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Réduire l’isolement social des aînés : idées d’intervention

Lorsqu’une personne âgée est isolée, il existe plusieurs solutions à mettre en place pour l’aider.

Nous avons recensé pour vous les meilleures approches et interventions pour réduire l’isolement social des aînés qui ont fait l’objet de recherches scientifiques. Ces techniques sont simples et peuvent être utilisées par tout le monde.

Dans cet article, nous abordons en profondeur le sujet de l’isolement social chez les aînés.

Nous vous présentons des statistiques, des définitions et les facteurs de risque et de protection de l’isolement social.



C’est quoi, l’isolement social ?

L’isolement social est le fait d’avoir peu de contacts et de piètre qualité avec autrui. Cette situation suppose moins de relations sociales et peu de rôles sociaux ainsi que l’absence de rapports mutuels gratifiants

Conseil national des aînés (2014)

Isolement social et solitude : quelle est la différence ?

En intervention, il est important de bien comprendre la nuance entre le fait d’être seul VS. se sentir seul :

En premier lieu, être seul veut dire avoir peu de contacts sociaux.

Cela n’implique pas toujours de la souffrance, car certaines personnes un besoin de peu de contacts pour être heureuses.

Au contraire, se sentir seul veut dire les contacts sociaux sont insatisfaisants, peu importe leur nombre. Le fait de se sentir seul engendre nécessairement de la souffrance. Nous pourrions aussi appeler cela le sentiment de solitude.

En résumé, pour certains aînés, c’est la quantité (le nombre) de relations qui est important. Au contraires, d’autres personnes diront que c’est la qualité (la profondeur) des relations qui fait toute la différence.

Bref: L’intervenant doit tenir compte des préférences sociales d’une personne pour juger de la présence ou non d’une souffrance derrière l’isolement, au-delà des nombres.

Statistiques sur l’isolement social des aînés:

L’isolement social chez les aînés est une réalité sérieuse qui soulève de plus en plus d’inquiétudes dans notre société.

En effet, avec le vieillissement des populations, les aînés isolés sont de plus en plus nombreux et les conséquences de leur solitude sur leur santé et leur bien-être sont majeures. 

Voici quelques statistiques :

  • En 2036, les personnes âgées représenteront 25% de la population canadienne (Statistique Canada, 2012).
  • Selon la Fédération internationale du vieillissement (2012), la principale difficulté à laquelle les aînés font face est le maintien de leurs contacts sociaux.
  • Selon une enquête d’envergure réalisée par Statistique Canada (2010, cité dans Conseil National des aînés, 2017), 16% des aînés se sentent isolés. Certains auteurs avancent même que ce chiffre pourrait atteindre 40%.

Projection de la pyramide des âges en 2009, 2036 et 2061 par Statistiques Canada

Les conséquences de l’isolement sociale chez les ainés

La littérature scientifique étant encore récente sur le sujet, il est difficile de bien comprendre les conséquences de l’isolement chez les aînés.

En fait, certaines conséquences de l’isolement seraient aussi…des facteurs de risque!

Autrement dit: l’isolement social entraîne des conséquences qui augmentent l’isolement social. Cela n’aide pas la situation.

Nous pouvons catégoriser plusieurs types de conséquences :

  1. Des conséquences comportementales. Les aînés isolés sont plus à risque de malnutrition, de chutes, d’alcoolisme, de tabagisme et de sédentarité.
  2. Des conséquences sur la santé mentale. Le risque de déclin cognitif était deux fois plus élevé chez les aînés isolés (Zunzunegui et al. 2003). Les chances de développer une maladie d’Alzheimer sont deux fois plus élevées que la population non isolée (Povova et al., 2012). Ajoutons les niveaux d’anxiété plus élevés et le plus haut risque de dépression et de suicide, particulièrement chez les hommes.
  3. Des conséquences sur la santé physique. Un taux de mortalité plus élevé, maladies cardio-vasculaires, perturbations du système endocrinien, décès suite à un AVC, haute pression, réhospitalisation, etc.
  4. Des conséquences sociales. Un plus haut risque d’abus, de maltraitance, perturbation des relations sociales (car plus de maladies), diminution des habiletés sociales, etc.

Les facteurs de protection de l’isolement social chez les aînés

En général, il y a deux principaux facteurs de protection qui peuvent expliquer pourquoi certains aînés sont isolés, mais n’en souffrent pas, ou au contraire, ne sont pas isolés et souffrent de solitude.

  1. Les personnes qui sont capables d’ajuster leurs attentes sociales à la réalité de leur situation souffrent moins (Ha et Ingersoll-Dayton, 2011). Par exemple, une personne âgée voudrait toujours avoir de la compagnie. Cependant, elle vit seul dans un logement et ne peut pas sortir souvent. L’incapacité à répondre à ses attentes sociales engendrera plus de détresse chez elle.
  2. Le sentiment de satisfaction dans les relations amicales est le plus fort facteur de protection contre le sentiment de solitude (Holmen et Furukawa, 2002). Autrement dit, plus on est satisfait de nos relations existantes, moins le sentiment d’être isolés est fort.

Les facteurs de risque de l’isolement social

Les facteurs de risques augmentent la probabilité d’un aîné soit isolé.

En premier lieu, mentionnons que les études longitudinales sur le sujet sont très rares.

En effet, peu d’études documentent les facteurs qui augmentent le risque d’isolement social chez les aînés

MAIS…

Étonnamment, certains chercheurs ont trouvé que certains facteurs peuvent être présents dès l’enfance… Nous vous présentons ces facteurs.

Tableau des facteurs de risque de l’isolement social

ÂgeFacteurs de risque
Facteurs de risque avant 65 ans-Faible niveau de scolarité (moins de 12 ans de scolarité = 1,5 fois plus de risque d’être isolés!)
-Faible niveau socio-économique
-Problèmes physiques qui restreignent les activités
-Être une femme
-Être veuf ou divorcé
-Appartenir à la communauté LGBT+ ou à une minorité ethnique
Facteurs de risque après 65 ans1. facteurs de santé psychologique: dépression, démence, faible estime de soi
2. Facteurs de santé physique: incapacités fonctionnelles, problèmes auditifs ou de vision, maladies chroniques, insomnie, incontinence.
3. Facteurs relatifs aux ressource sociales: faibles habiletés sociales (secondaires ou non aux pertes cognitives), fin des activités communautaires ou du bénévolat, désengagement dans les activités, faible sentiment d’intégration dans la société
4. Les facteurs précipitants: décès d’un proche ou d’un conjoint, retraite, perte d’un permis de conduire, hospitalisation et admission en maison d’hébergement.

Trois approches pour réduire l’isolement social des personnes âgées

Nous avons exploré trois revues exploratoires de la littérature sur le sujet (Brownie et Horstmanshof, 2011; Gardinier et al., 2016; Grenade et Boldy, 2008) et recensé les trois principales approches les plus efficaces :

  1. La réminiscence
  2. L’empowerment ou, en français, l’autonomisation
  3. Les activités de loisirs

Malgré leur noms compliqués, ces approches sont simples et peuvent être utilisés par les intervenants ou les proches de personnes âgées. Les voici :

Réduire l’isolement social grâce à la réminiscence:

La réminiscence mériterait à elle seule un article complet.

La réminiscence est une intervention qui consiste à utiliser la mémoire autobiographique pour transmettre des connaissances, travailler les conflits non résolus et focaliser sur les éléments agréables du présent

Talbot-Mahmoudi, 2015

Cette approche ne permet pas de réduire l’isolement à proprement dit, mais elle s’est montrée efficace pour réduire l’intensité de plusieurs facteurs de risque de l’isolement, comme la dépression ou la fatigue

Comment utiliser la réminiscence dans ses interventions?

  • Demander à un aîné de vous parler des personnes qui sont photographiées dans son album photo. Qui sont-elles ? Quelles activités faisaient-ils ensemble ? Pourquoi cette personne-là est-elle importante?
  • Visionner un montage de photo d’époque sur un sujet qui intéresse l’aîné (ex: regarder un montage photo ou vidéo de vieilles voitures d’époque)
  • Discuter de «comment c’était la vie, dans son temps».
  • Écouter et chanter les musiques préférées avec la personne, parler de ses souvenirs en lien avec la chanson.

Souvenirs d’une chanson

«Je me souviens d’une femme atteinte d’alzheimer avancé qui me demandais toujours « comment je m’appelle ? ». Un jour, j’ai fais joué La vie en rose d’Édith Piaf. La femme s’est mise à chanter les paroles du début à la fin. Je n’en revenais pas! »
Témoignage d’une psychoéducatrice en CHSLD

L’empowerment pour augmenter le sentiment de contrôle sur ses relations sociales

L’empowerment est une approche intéressante pour réduire l’isolement social des aînés.

Les interventions en autonomisation (ou empowerment) visent à augmenter le sentiment de pouvoir et de compétence des individus, notamment par le développement d’habiletés sociales ou d’outils qui permettent à l’individu de faire des choix (et donc d’avoir du pouvoir sur sa vie).

N’oublions pas que les personnes âgées ont souvent vécu beaucoup de pertes incontrôlables dans leur vie: pertes des capacités physiques, perte de l’autonomie, perte des êtres chers…

Ensuite, l’empowerment est une approche intéressante puisqu’elle permet d’augmenter les facteurs de protection qui protègent contre l’isolement social.

Comment utiliser l’empowerment pour réduire l’isolement social des aînés?

Il y a deux principales manières d’utiliser l’empowerment :

Premièrement, on peut aider les aînés à clarifier leurs besoins relationnels, à analyser leur réseau social et à trouver des moyens pour l’améliorer et pour atteindre un plus haut degré de satisfaction, tout en développant leurs habiletés sociales.

Par exemple, Mme Roland pourrait se fixer comme objectif (avec votre aide) d’aller discuter au moins une fois par semaine avec sa voisine de chambre qui semble bien sympathique.

En même temps, vous pourriez l’outiller à trouver des sujets de conversations pour initier le contact, par exemple parler de sa passion pour la peinture.

Deuxièmement, vous pourriez accompagner un aîné à débuter un projet valorisant et rassembleur (et pas besoin que ce soit un projet monstre!).

Par exemple, aidez Monsieur Jacques, qui adore le hockey, à partir son club de hockey parmi les résidents afin que ceux-ci se réussissent le samedi soir pour écouter le match des Canadiens.

Encore mieux: Monsieur Jacques pourrait lui-même animer les rencontres et dire un petit mot de bienvenue au début de la rencontre.

Les activités de loisirs : un levier important pour nouer des amitiés et réduire l’isolement.

Une activité de loisir, ça ne sert pas juste à passer le temps.

Une activité est aussi une opportunité de rencontrer de nouvelles personnes, de se faire connaître et de rencontrer des personnes qui ont un intérêt similaire.

Exemples d’activités qui réduisent l’isolement social

Les meilleures activités pour réduire l’isolement social des aînés sont celles qui permettent de redonner une responsabilité sociale aux aînés.

1. La zoothérapie.

La zoothérapie est une approche prometteuse.

Les animaux ont souvent la capacité d’apaiser les gens, mais ils rappellent également de bons souvenirs.

Grâce à la zoothérapie, vous pourriez demander à une personne de brosser un animal, de lui donner un soin, de jouer avec lui.

C’est une manière de se sentir utile en apportant du bien à un animal qu’on apprécie (chat, chien, poisson, etc.)

2. Les activités de jardinage

Les activités de jardinage: cette activité mérite une mention à part, car beaucoup d’auteurs se sont attardés à évaluer l’effet du jardinage sur le sentiment de solitude.

Ces activités peuvent êtres réalisées en groupe (faire un plan de jardin, entretenir les fleurs, faire pousser des fines herbes pour les donner à autrui, donner des conseils aux autres sur l’entretien des plantes, etc.).

Elles auraient des effets positifs sur la satisfaction de vie et le développement d’un réseau social (Tse, 2010).

3. Les clubs de partage

Les clubs de partage.

Basés sur n’importe quel intérêt, les clubs (ou groupes) qui partagent des intérêts communs peuvent se regrouper à une fréquence fixe (ex: une fois par semaine à une fois par mois) pour faire des activités en lien avec leurs intérêts.

Par exemple, ils peuvent visiter un musée, aller dans une bibliothèque, lire des livres, cuisiner, faire de la marche, écrire de la poésie, etc.

4. Les autres activités sociales

Toute autre activité sociale, par exemple la thérapie pleine conscience, thérapie par l’humour, le bénévolat, l’entraînement physique, les programmes de soutien par téléphone et même … par réseau social (et oui !).

Ajoutons qu’il existe de belles initiatives, quoique couteuses, comme le projet Eden.

Celui-ci consiste à rendre l’environnement des résidences plus « humain » en incluant des animaux, des jardins et des garderies dans les résidences et qui ont aussi montré des résultats intéressants

Finalement, il existe plusieurs autres types d’interventions qui sont efficaces pour réduire l’isolement social des aînés, nous vous avons présenté celles qui retenaient le plus d’attention dans la littérature scientifique.

Cependant, toutes les initiatives pour aider une personne âgée à se sentir moins seule sont importantes.

Ensemble, on peut faire une différence, un pas à la fois .

La vie, le malheur, l’isolement, l’abandon, la pauvreté, sont des champs de bataille qui ont leurs héros ; héros obscurs plus grands parfois que les héros illustres.

Victor Hugo

Quels sont vos bons coups pour réduire l’isolement social des aînés ?

Dans un souci d’alléger le texte, nous n’avons pas cité l’ensemble des études consultées (il y en avait plus de 80!). Si vous souhaitez avoir une référence pour un énoncé dans cet article, écrivez-nous à info@creasources.ca

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