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L’alliance thérapeutique : mieux comprendre et intervenir

L’alliance thérapeutique : c’est quoi ? Comment faire pour l’améliorer? Comment reconnaître un bris de relation et le réparer ?

Intervenir auprès des populations vulnérables n’est pas toujours de tout repos et nos valeurs sont parfois mises à rude épreuve.

En effet, nous avons tous la bonne intention de développer une relation mutuelle de confiance avec le client (nous pourrions aussi utiliser le terme « usager», « sujet », « enfant », etc.).

Cependant, il peut arriver, de manière involontaire, un bris ou une rupture dans la relation. Elle doit être rétablie pour poursuivre le travail entamé avec le client.

En intervention, la qualité de la relation intervenant-client influence les résultats et le succès de l’intervention.

Les études montrent que plus l’alliance thérapeutique est bonne , plus les changements sont susceptibles d’être positifs chez ce dernier.

Alors, quoi faire lorsqu’un bris ou une rupture dans la relation survient?

D’abord, qu’est-ce que l’alliance thérapeutique ?

L’alliance thérapeutique peut se définir comme la collaboration mutuelle, le partenariat, entre le patient et le thérapeute dans le but d’accomplir les objectifs fixés.

Perspectives Psy, Vol. 49, n°4, octobre-décembre 2010, p. 317-326

L’alliance thérapeutique évolue tout au long de votre relation avec le client.

Le concept d’alliance thérapeutique ne concerne pas seulement le domaine de la psychologie.

Ici, nous pourrions parler des psychoéducateurs, éducateurs spécialisés, travailleurs sociaux, thérapeutes, etc. Ceux-ci doivent également développer une relation de confiance mutuelle avec leurs clients.

En tant qu’intervenants, nous devons tenir compte de l’alliance pour travailler avec le client à l’atteinte des objectifs fixés.

Quels facteurs influencent la qualité de l’alliance thérapeutique ?

Parmi les facteurs qui influencent la qualité de l’alliance thérapeutique, nous pouvons cibler 4 catégories de facteurs importants:

  1. Des facteurs propres à l’intervenant. Par exemple: la ponctualité dans l’intervention, le degré d’engagement, l’établissement de règles claires et les compétences en intervention. Ajoutons aussi la capacité à régler des conflits personnels, l’ouverture, le respect, l’empathie, la considération, la rétrospection, etc.
  2. Des facteurs propres au client. Par exemple: sa personnalité, ses expériences personnelles, sa capacité à avoir confiance envers autrui, ses habiletés relationnelles, etc. Intéressant à noter: selon certaines études, les corrélations entre les caractéristiques du client et la qualité de l’alliance thérapeutique sont faibles. Autrement dit: les facteurs propres au client ne seraient pas très déterminants dans le développement du lien (Despland et al, 2000).
  3. Des facteurs externes. Par exemple: une pandémie mondiale entraînant une coupure de services…
  4. Des facteurs liés à l’interaction intervenant-client.

Quelles sont les causes d’un bris d’alliance?

Plusieurs facteurs peuvent causer un bris d’alliance:

  1. un désaccord sur les objectifs de l’intervention
  2. Un désaccord sur les tâches nécessaires pour atteindre les objectifs
  3. Une problématique dans le lien client-intervenant.

1. Désaccord sur les objectifs:

Les désaccords sur les objectifs surviennent quand le client n’a pas le sentiment que les objectifs respectent ses besoins, ses capacités et ses limites.

Par exemple, vous exigez de votre client qu’il atteigne un objectif trop élevé pour lui : vous risquez de le décourager.

Au contraire, si votre objectif est beaucoup trop facile, le client n’y trouvera aucune motivation.

Finalement, il se peut que l’objectif que vous jugez prioritaire ne le soit pas pour le client. Dans ce cas, il faut trouver un terrain d’entente avec le client. Identifiez des objectifs dans lesquels chacun se sent confortable et en confiance.

En psychoéducation, cela fait aussi référence au concept d’équilibre et de déséquilibre dynamique.

2. Désaccord sur les tâches:

Dans un même ordre d’idée, les désaccords sur les tâches surviennent quand le client et l’intervenant ne s’entendent pas sur les tâches qui permettraient d’atteindre les objectifs.

De ce fait, une tâche trop difficile, stressante, peu stimulante ou inconfortable pour le client peut entraîner un désaccord.

3. Problème associé au lien :

Les problèmes associés au lien peuvent être reliés à une faible confiance dans la relation.

La confiance vaut autant pour celle client envers son intervenant que celle de l’intervenant envers son client.

Par exemple, le client ou vous-mêmes êtes peu attentionnés et peu engagés dans la relation. Résultat ? Le lien risque d’être plus faible, car l’attitude et les comportements témoignent d’un désintérêt.

Aussi, si personne ne témoigne pas de ses émotions ou de son vécu, il sera difficile de construire un lien. La confiance mutuelle se construit entre autres à travers l’authenticité et la transparence.

Bref, cela souligne l’importante pour l’intervenant de bien développer ses schèmes relationnels, ses savoirs-être et ses savoirs-faire avec bienveillance.

Comment reconnaître un bris d’alliance?

7 éléments révélateurs d’un bris d’alliance

Safran et ses collaborateurs (1990) nous proposent 7 éléments révélateurs d’un bris d’alliance. Ils sont également bien détaillés par Baillargeon et Puskas (2013).

  1. L’expression directe d’un sentiment négatif (ex: insulter l’intervenant, critiquer l’intervention )
  2. L’expression indirecte d’un sentiment négatif ou d’hostilité (faire des remarques inappropriées devant les autres)
  3. Les désaccords avec les objectifs ou les tâches de l’intervention (ex: se plaindre des objectifs ou des tâches)
  4. La complaisance (ex: être toujours d’accord avec tout ce qui est proposé, ne pas dire son opinion)
  5. Les manœuvres d’évitement dans l’intervention (ex: changer de sujet, s’absenter, trouver des excuses pour ne pas avoir fait la tâche)
  6. Les comportements qui rehaussent l’estime de soi, comme la défense à une dévalorisation (ex: se justifier, vanter ses mérites et ses réussites)
  7. La non-réponse à une intervention (ex: ne pas utiliser les moyens)

Les comportements associés aux bris d’alliances peuvent être classés en deux grandes catégories : des comportements de retrait ou de confrontation.

Comment réparer un bris d’alliance ?

Le bris d’alliance peut représenter une opportunité de construire un lien encore plus solide avec le client.

L’intervenant qui saisit l’occasion peut apporter des changements encore plus positifs dans l’intervention.

Les intervenants ont tout à gagner d’être à l’écoute de ces ruptures et du client.

Évidemment, le premier élément important pour réparer un bris d’alliance est … d’y être attentif !

Votre client annule tout ses rendez-vous depuis un moment ? Peut-être est-ce le signe que l’intervention que vous proposez ne lui convient pas. Peut-être qu’elle ne répond pas à ses besoins ou qu’elle est trop difficile pour ses capacités. Et c’est normal : tous les intervenants vivent des bris d’alliance un jour ou l’autre.

Alors, quoi faire une fois que le bris est constaté ou suspecté ?

Deux solutions pour réparer un bris d’alliance

1. Accepter ses responsabilités

D’abord, une relation implique toujours au moins deux personnes. Ainsi, chacun a sa part de responsabilité dans le lien qui se développe.

En tant qu’intervenants, nous sommes tous humains. C’est pourquoi nous faisons tous des erreurs (plus ou moins graves). Bien souvent, celles-ci sont imprévisibles et vos collègues vous diront « j’aurais fait la même chose ».

Par exemple : un matin, après avoir reçu de mauvaises nouvelles, vous ne vous sentez pas disponible pour écouter votre client. Le client, qui a vécu du rejet étant enfant, perçoit votre manque d’intérêt soudain. Ainsi, pour éviter le sentiment de rejet, il décide de ne plus venir aux rencontres.

Dans cet exemple, l’intervenant aurait peut-être dû repousser la rencontre à un meilleur jour ou nommer sa fatigue dès le début.

Dans ce cas, l’erreur n’est pas immense et mal intentionnée, mais elle l’était pour le client.

Si nous exigeons d’un client qu’il s’améliore à travers l’intervention, il faut aussi avoir cette exigence envers soi-même.

Soyez à l’écoute de vos sentiments, il est possible que vous vous sentiez exactement comme le client dans la relation…

2. Manifester de l’empathie pour le client.

Suite au bris, faites sentir au client que vous comprenez la situation et ses émotions.

Comment? Partagez-lui les vôtres afin de permettre une compréhension mutuelle de la situation et mettre les cartes sur la table.

Vous connaissez la fameuse phrase  [ je ] [émotion ] [ reflet ] [ confirmation ] ?.

Reprenons l’exemple précédent. « Je suis désolé, j’étais préoccupé par des raisons personnelles, j’ai l’impression qu’à la dernière rencontre, tu ne t’es pas senti écouté, est-ce que je me trompe ?

Bref, les intervenants gagnent à porter une attention particulière à la relation de confiance qui s’établit avec le client.


Et vous, avez vous déjà vécu un bris dans la relation en tant qu’intervenant ? Laissez-nous la réponse en commentaire, nous sommes curieux de le savoir et de connaître vos conseils !

L’emploi du genre masculin a pour but d’alléger le texte et d’en faciliter la lecture. Ce texte ne prétend pas définir l’entièreté du concept d’alliance thérapeutique. Le concept d’alliance thérapeutique demeure un sujet complexe.